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Population et ménages : l’évolution en Suisse jusqu’en 2050

04 juin 2024

Road, Tarmac, People

L’évolution démographique est l’un des principaux facteurs d’influence sur le marché immobilier. Elle détermine la demande de logements et se répercute donc sur leurs prix et leurs loyers. Mais comment la population suisse va-t-elle évoluer au cours des prochaines décennies ? À quels changements faut-il s’attendre dans la composition des ménages ? Et comment ces évolutions se répartissent-elles sur le territoire suisse ? Ces questions seront abordées à l’aide des nouveaux modèles de prévision de la population et des ménages à petite échelle de Wüest Partner.

La relation entre démographie et immobilier est multiple, complexe et marquée par de nombreuses interactions. Si une croissance démographique plus élevée stimule nécessairement la demande, la dynamique du marché immobilier peut aussi influencer les comportements en matière de formation de ménages. Le manque de logements ou leurs prix élevés peuvent par exemple inciter la population à cohabiter davantage. De même, la quantité et le type de constructions neuves, les aménagements urbains, la proximité des emplois, des surfaces de vente et des infrastructures façonnent aussi l’évolution et la structure de la population.

10 millions d’habitants en 2041?

L’année 2023 s’est distinguée par une croissance démographique particulièrement élevée, de 1,6%, ce qui représente quelque 145 000 habitants supplémentaires. Cela s’explique d’une part par la pénurie de main-d’oeuvre, qui a incité de nombreuses entreprises à recruter des travailleurs à l’étranger. Le solde migratoire de la population étrangère s’élevait à 98 900 personnes, soit la valeur la plus haute de la décennie. D’autre part, les réfugiés ukrainiens vivant en Suisse depuis plus d’un an sont désormais comptabilisés dans la population résidante permanente (environ 50 000 personnes).

La croissance démographique devrait retrouver son niveau moyen en 2024, avec +0,9%, car les créations d'emplois ne devraient plus être aussi nombreuses. La Suisse devrait malgré tout passer la barre des 9 millions d’habitants cette année.

À plus long terme, la population suisse devrait continuer de progresser et pourrait ainsi dépasser les 10 millions dès 2041. Le taux de croissance devrait toutefois ralentir progressivement: d’une part, le vieillissement de la population et une faible natalité entraînera une diminution de l’excédent de naissances. Celui-ci était en moyenne de +16 700 au cours des 10 dernières années, mais il ne serait que de +10 900 entre 2024 et 2030 et il deviendrait même négatif dès 2039. De même, le vieillissement de la population dans les grands pays voisins (France, Allemagne, Italie) amoindrira la population active dans ces pays et donc les flux migratoires vers la Suisse.

Population et ménages: des dynamiques distinctes

La Suisse compte aujourd’hui un peu moins de 4 millions de ménages, mais elle devrait accueillir environ 240 000 ménages supplémentaires d’ici 2030, et 750 000 ménages en plus d’ici 2050. Bien que la croissance démographique et l’augmentation du nombre de ménages soient intrinsèquement liées, elles présentent des dynamiques distinctes. L’évolution des modes de vie et de la structure d’âge de la population façonnera la manière de vivre ensemble de la population et ses choix en matière de formation de ménages. Entre 2012 et 2022, le nombre de ménages a augmenté de 1,3% par an en moyenne, tandis que la population n’a progressé que de 0,9%. Le nombre de ménages a donc connu une croissance 40% plus rapide que celle de la population.

Cette différence a été moins marquée en 2022 et 2023, car la pénurie actuelle de logements a poussé la population à former davantage de grands ménages. Néanmoins, la tendance à l’individualisation et à la formation de ménages plus petits se maintient à long terme. Ainsi, entre 2023 et 2050, ce sont les ménages d’une personne qui augmenteront le plus (+28%) suivis de près par les ménages de deux personnes (+24%). Cette tendance s’explique d’une part par le vieillissement de la population: les personnes de plus de 65 ans vivent majoritairement dans des petits ménages d’une ou deux personnes, et leur part dans la population devrait s’accroître sensiblement. D’autre part, la relative prospérité économique suisse devrait continuer à favoriser l’émergence de petits ménages.

Forte croissance dans les agglomérations et dépeuplement des régions périphériques

L’analyse des données régionales révèle que les communes d’agglomération des grandes villes connaîtront l’essor démographique le plus important d’ici 2030, avec une croissance annuelle de la population et des ménages de plus de 1%. Ces communes sont très attrayantes en raison de leur proximité des grands centres économiques, de leur bonne desserte par les transports publics et de coûts du logement plus abordables qu’au centre-ville; elles peuvent en outre accueillir davantage de nouveaux ménages que les grandes villes grâce à une activité de construction neuve plus intense.

La commune de Bussigny, près de Lausanne, pourrait par exemple accueillir plus de 30% d’habitants supplémentaires en 2030 par rapport à 2023. Un important développement est également attendu à Thônex, Chêne-Bougeries et Veyrier (agglomération de Genève), ainsi qu’à Opfikon, Bülach et Dübendorf (agglomération de Zurich).

Forte croissance dans les cantons de Fribourg, Vaud et Argovie

La plus forte croissance démographique de tous les cantons est attendue à Fribourg, qui devrait voir sa population progresser de 1,2% par an jusqu’en 2030. Les régions MS de la Gruyère, Glâne-Veveyse et la Broye, qui sont en partie tournées vers Lausanne, devraient même atteindre une croissance de plus de 1,5%. Cela devrait surtout se produire si l’économie locale, notamment dans la région de Lausanne, continue à se développer de manière très positive. Les cantons de Vaud, Zurich et Genève verront également leur population croître plus vite que la moyenne, en raison de leur grande attractivité économique et de leur population relativement jeune (la part des plus de 65 ans y est comparativement faible).

21 des 106 régions MS doivent s’attendre à un recul de leur population d’ici 2030. Il s’agit de régions périphériques des cantons des Grisons, du Tessin, de Berne et de Neuchâtel, qui sont relativement éloignées des centres économiques et dont la population vieillissante ne sera pas compensée par l’immigration. La tendance au home-office pourrait au mieux y apporter un peu plus de dynamisme, car elle rend ces régions excentrées plus attrayantes.

Il est intéressant de noter que le nombre de ménages devrait augmenter dans les cantons du Tessin et de Neuchâtel, bien que leur population stagne, voire diminue. Ces tendances contradictoires ne sont pas incompatibles dans la mesure où le nombre moyen de personnes par ménage continuera de baisser dans les années à venir.

La Suisse de 2050

À l’horizon 2050, la Suisse pourrait compter 10,3 millions d’habitants répartis dans 4,7 millions de ménages. La concentration de la population dans les grandes villes et leur agglomération devrait encore s’intensifier, nécessitant un développement urbain important, tandis que certaines régions périphériques et les zones de montagne isolées pourraient se dépeupler progressivement.

État des prévisions: 1er trimestre 2024. Source: Wüest Partner

La réalisation de ces prévisions dépendra en grande partie des évolutions internationales. Ainsi, l’attractivité relative du marché du travail suisse par rapport à l’étranger joue un rôle important dans l’afflux de main-d’oeuvre. Les guerres et le changement climatique ont une grande influence sur les flux de réfugiés. Concernant l’excédent de naissances, il reste à voir si le fort déclin observé ces dernières années est temporaire ou durable. Enfin, les politiques de migration, de logement, de famille et de construction exercent également une grande influence sur l’évolution de la population.

Les modèles de prévision de Wüest Partner

Modèle de prévision de la population de Wüest Partner
Le modèle de prévision de la population de Wüest Partner permet de prédire l’évolution de la population résidante permanente au niveau communal, par âge, sexe et nationalité. Le modèle se fonde sur la méthode des composantes de cohorte en prenant comme point de départ le dernier bilan démographique disponible de l’Office fédéral de la statistique (OFS). Les évolutions futures sont calculées sur la base d’hypothèses concernant les taux de migration, de natalité, de mortalité et de naturalisation dans chaque cohorte. On utilise par exemple des taux de fécondité et de mortalité par âge pour prédire le nombre de naissances et décès dans la population. Les flux d’immigration et d’émigration sont estimés séparément, en tenant compte des probabilités de migration à long terme ainsi que de la baisse de la population active dans les pays voisins qui affaiblit le potentiel migratoire venant de ces pays. Le modèle est complété par d’autres données (attractivité des communes selon le niveau des loyers et le rating d’emplacement et de marché, capacité à accueillir de nouveaux habitants, zones de développement, activité de construction neuve, etc.) afin d’affiner les projections démographiques locales. Les deux principales forces de ce modèle sont d'une part la granularité fine des données, qui permet des prévisions au niveau communal. D’autre part, le modèle est régulièrement mis à jour afin d’intégrer les chiffres et les tendances les plus récents. Par exemple, nous avons récemment revu à la baisse les hypothèses de fécondité afin de tenir compte de la baisse de la natalité observée ces deux dernières années.

Modèle de prévision des ménages de Wüest Partner
Le modèle de prévision des ménages estime l’évolution des ménages entre 2023 et 2050 sur la base des données actuelles des ménages et des prévisions de population issues du modèle de Wüest Partner (voir ci-dessus). La population suisse est divisée en 684 segments sur la base du sexe, de la nationalité, de la classe d’âge quinquennale et du type de commune qu’elle habite. Pour chaque segment, on considère la distribution actuelle des ménages de 1 à 5 personnes. Les prévisions démographiques permettent ensuite de prédire combien de personnes appartiendront à chaque segment à l’avenir. En appliquant la distribution actuelle des ménages à ces futurs segments de la population, le modèle peut prédire comment le nombre total de ménages va évoluer, au niveau national et local. Ces estimations basées sur la composition de la population sont complétées par une tendance nationale qui permet de prendre en compte d’autres facteurs susceptibles d’influencer l’évolution des ménages.

Possibilités d'utilisation

Les prévisions démographiques de Wüest Partner offrent des prévisions démographiques actuelles, à petite échelle et spécifiques à l'âge. Elle peut par exemple servir de base à la planification des locaux scolaires ou à l'estimation de la demande future en matière de garde d'enfants et de personnes âgées ou de services de santé.

Étude issue de l'édition actuelle de l'Immo-Monitoring

Cet article est un extrait de notre dernière édition de l'Immo-Monitoring. Si vous souhaitez plus d'informations, vous pouvez commander votre exemplaire ici.

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